Tax alert 11 septembre 2020

Option TVA sur les loyers : Gagnez le gros lot !

Par une décision en date du 9 septembre 2020[1], le Conseil d’Etat vient confirmer[2] la possibilité d’exercer l’option pour l’assujettissement des loyers à la TVA lot par lot et non plus de manière globale par immeuble ou ensemble immobilier.

Principe : une option TVA globale par immeuble/ensemble immobilier

Rappelons que les locations de locaux nus à usage professionnel sont en principe exonérées de TVA[3]. Toutefois, le contribuable a la possibilité d’assujettir les loyers à la taxe par le biais de l’option prévue au 2° de l’article 260 du CGI.

Par ailleurs, l’article 193 de l’annexe II au CGI précise que « dans les immeubles ou ensembles d’immeubles comprenant à la fois des locaux nus donnés en location ouvrant droit à l’option [TVA] et d’autres locaux, l’option ne s’étend pas à ces derniers mais elle s’applique globalement à l’ensemble des locaux de la première catégorie. »

La doctrine administrative[4] confirme la globalité de l’option en précisant qu’elle doit couvrir « obligatoirement tous les locaux non exclus de son champ d’application qu’un bailleur possède dans un immeuble donné ». Il en résulte que, dès lors que les locaux entrent dans le champ d’application de l’option, celle-ci s’applique automatiquement de manière globale (sur la base de la seule référence aux immeubles), sans que ne soit tenue compte de la volonté du bailleur ou du preneur récupérateur ou non-récupérateur de la TVA. Ce point pouvait donc faire l’objet de discussions dans le cadre des négociations avec des preneurs non-récupérateurs dans la mesure où (i) le bailleur ne souhaitait pas impacter son droit à déduction et (ii) le preneur ne souhaitait pas avoir à sa charge un coût de TVA non déductible (20%).

Nouveauté jurisprudentielle d’envergure : une option par local

C’est donc à contre-courant de la position de l’administration fiscale, telle qu’elle existe au Bofip aujourd’hui, que le Conseil d’Etat se place, offrant ainsi la possibilité au bailleur d’arbitrer entre les locaux qu’il souhaite faire entrer dans le champ d’application de la TVA et ceux qu’il souhaite louer sans taxe. Dans sa décision, la Haute Juridiction fait application des normes et de la jurisprudence européennes[5].

Dès lors, il sera dorénavant possible de ne pas opter et par conséquent de ne pas soumettre à la TVA le loyer payé par un locataire non assujetti. Le propriétaire pourra alors n’opter que pour les locaux pris à bail par des preneurs pouvant récupérer la TVA payée sur les loyers.

Evidemment, dans ce cas de figure, le bailleur ne pourra déduire que partiellement (à hauteur de la proportion de lots pour lesquels l’option aura été exercée) la TVA acquittée sur l’acquisition, les éventuels travaux ou frais d’exploitation relatifs à l’immeuble concerné. Aussi, dans une telle situation, les bailleurs pourraient également avoir des impacts en matière de taxe sur les salaires. 

Cette décision d’importance offre ainsi aux acteurs de l’immobilier une plus grande souplesse dans la gestion de leurs investissements. Elle méritera d’être précisée et commentée lors d’une mise à jour du Bofip.

En pratique

A l’avenir, il conviendra de bien s’assurer que la lettre d’option vise spécifiquement et précisément les locaux concernés ainsi que les baux y relatifs.

S’agissant des options TVA passées, une réflexion relative à l’opportunité de les dénoncer afin de formuler de nouvelles options par lot devra être menée, étant précisé qu’en l’état actuel du droit, l’option exercée pour un immeuble ne peut être dénoncée qu’à partir du 1er janvier de la neuvième année civile suivant celle au cours de laquelle elle a été exercée. Il sera alors nécessaire de connaître la position de l’administration sur la possibilité d’amender les options déjà exercées ou de formuler de nouvelles options en dénonçant les options initiales sans avoir à tenir compte du délai susvisé.

Equipes Immobilière et TVA d’Arsene

[1] CE, 9 septembre 2020, n°439143, 8e et 3e chambres réunies, SCI EMO
[2] CAA Nancy, 27 décembre 2019, n°18NC02185, SCI Emo
[3] Article 261 D du CGI
[4] BOI-TVA-CHAMP-50-10-20140404 § 110 et 120
[5] Articles 135 et 137 de directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 & arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 12 janvier 2006, Turn- und Sportunion Waldburg contre Finanzlandesdirektion für Oberösterreich (C-246/04)